Gabon : La dette transmise aux générations futures
Confronté à une dette publique qui représente 42% de son PIB en 2016 selon la COFACE, 50.1% selon le FMI, le Gabon cherche désormais des solutions susceptibles d’alléger le poids de la dette sur son économie. Alors que le contexte économique marqué par un recul des recettes budgétaires commande plutôt une réduction urgente du train de vie l’Etat, les autorités semblent avoir fait le choix du rééchelonnement de la dette. En procédant ainsi, le gouvernement souhaite reporter le remboursement du capital et/ou des intérêts de plusieurs années et ainsi faire peser la charge de la dette sur les générations futures.
Quand le poids de la dette devient problématique
La charge de la dette du Gabon devient difficilement supportable pour les finances publiques du pays. En augmentation de 144% à 3 334 milliards FCFA selon les projections de la COFACE (ou de 190% à 3 969 milliards FCFA selon les projections du FMI), le remboursement de la dette et des charges financières inhérentes absorbe désormais une part importante des ressources publiques. Si de nombreuses personnalités et analystes ont alerté depuis des mois sur le mode de gestion des ressources publiques au Gabon, peu conforme aux règles de l’orthodoxie, ils ont depuis été rejoints par des personnalités issues du régime, à l’instar de l’ancien Président de l’Assemblée nationale qui n’hésite pas à déclarer à la presse que son pays est en cessation de paiement.
Profitant du séjour à Libreville (Gabon) du Président de la Conférence consultative politique du peuple chinois, Yu Zengsheng, le gouvernement gabonais a sollicité un rééchelonnement de sa dette vis-à-vis de la Chine vers laquelle il se tourne de plus en plus pour solliciter des crédits. Ainsi, sur la seule année 2015 le Gabon aurait emprunté près de 219 milliards FCFA à l’Etat chinois en grande partie destinée à la construction d’infrastructures sportives dont l’impact sur le développement est relativement limité.
En choisissant le rééchelonnement de la dette publique, les autorités gabonaises s’orientent vers une méthode qui consiste à repousser dans le temps le remboursement de tout ou partie des dettes d’un Etat (ou d’un tiers), généralement en contrepartie d’un taux d’intérêt plus élevé. Souvent envisagé dans les périodes où le débiteur rencontre des difficultés à régler les échéances de prêt, le rééchelonnement permet de rallonger la durée des créances. Pour l’Etat débiteur, Il présente l’avantage d’alléger le service de la dette (les remboursements qu’il doit effectuer annuellement) mais ne le dispense pas du règlement intégral de sa dette. Le rééchelonnement présente cependant l’inconvénient de reporter la charge de la dette sur les générations futures qui en héritent.
La nécessité de réduire le train de vie de l’Etat et d’auditer la dette
En lieu et place du rééchelonnement de la dette qui apparait comme une solution de facilité, le gouvernement aurait été mieux avisé de réaliser des économies récurrentes en réduisant le train de vie de l’Etat. Les économies ainsi réalisées pourraient servir pour partie au remboursement de la dette sans besoin de passer par le rééchelonnement et à la relance de l’économie par l’investissement.
Pour être efficace la réduction du train de vie de l’Etat implique notamment de :
– Supprimer les institutions non-indispensables au bon fonctionnement de l’Etat ;
– Appliquer le principe de l’amortissement dans le renouvellement du parc automobile de l’Etat tout en limitant les coûts en abaissant le standing de certains véhicules administratifs ;
– Limiter les postes de hauts fonctionnaires à connotation politiques ;
– Réduire les fonds politiques mis à disposition de la Présidence de la République, du gouvernement et des différentes institutions constitutionnelles ;
– Limiter les recrutements dans la fonction publiques pour conserver une masse salariale soutenables ;
– Etc.
Par ailleurs, la dette publique s’étant accrue dans des proportions variant de 144 à 190% entre 2009 et 2016 selon les organismes, il est urgent de commanditer un audit de la dette publique du Gabon. En effet, un audit de la dette permettrait de donner une indication réelle du niveau d’endettement du Gabon, de l’origine mais surtout de la destination des différents emprunts. L’Etat pourrait ainsi savoir de façon exacte si les emprunts publics ont véritablement servi au financement des projets de développement dont ils devaient permettre la mise en œuvre ou s’ils ont été détournés de leur objectif initial.
Mays Mouissi
Sources principales :
– Etudes économiques Gabon de la COFACE
– Communiqué de presse n° 16/81 du 26/02/2016 du FMI
– Loi de finances 2016 – Gabon
– Stratégies nationales d’endettement
– Interview de Guy Nzouba Ndama à RFI du 13/04/2016
Bonne Analyse M. Mays MOUISSI. La nécessité de réduire le train de vie de l’Etat et d’auditer la dette a toujours fait l’objet d’une étude des étudiants à l’université OMAR BONGO ONDNIMBA, particulièrement en sciences économiques depuis des années, disons des décennies et a toujours fait l’objet des recherches, qui ont toujours abouti à la solution que vous proposez en ce jour mais, malheureusement, faute de nos dirigeants d’endurcir leurs cœurs, on en reste qu’à la case du départ. D’ailleurs parmi ces dirigeants, la plupart au Ministère de l’économie le savent et sont passé par là. Font-ils semblant de ne pas le reconnaître ?