Gabon : Comment les emplois formels ont-ils évolués depuis 30 ans ?
Avec un taux de chômage qui oscille entre 20 et 24% de la population active, la question de l’emploi constitue l’une des principales préoccupations des populations au Gabon. En 2010 une enquête nationale sur le chômage et l’emploi révélait que 47% des emplois du pays étaient liés à des activités informelles* tandis que les emplois dits formels, régulièrement déclarés, avoisinaient un effectif de 140 000 salariés (publics et privés compris). Comment les emplois formels ont-ils évolués depuis 1985 ? Quelle fut la répartition par secteur d’activité des emplois privés formels aux cours des 3 dernières ? Quels sont les secteurs où le nombre d’emplois progresse (et ceux où il régresse) ?
Evolution des emplois privés formels depuis 1985
Avec plus de 74 000 emplois privés formels régulièrement déclarés, l’année 1985 reste encore à ce jour celle où le Gabon a enregistré le plus grand nombre d’emplois légaux dans le secteur privé. En effet, à partir de 1986 le nombre d’emplois privés formels a progressivement décliné pour tomber à 38 000 salariés en 2009. Ainsi entre 1985 et 2009, le nombre d’emplois formels dans le secteur privé gabonais a-t-il baissé de 48.5% traduisant une incapacité du secteur productif à créer des emplois durables.
Si on a noté un léger frémissement avec une création nette de 1 947 emplois privés formels en 2007, c’est seulement à partir de 2010 que le secteur privé gabonais a créé durablement plus d’emplois qu’il n’en a détruit. Le taux de croissance moyen de 5% enregistré sur la période, les cours du pétrole particulièrement élevés et les travaux engagés dans le BTP notamment à l’occasion de la CAN 2012 ont favorisé ces créations d’emplois. Ainsi entre 2010 et 2014 le secteur a-t-il créé 32 634 emplois, un volume d’emplois honorable puisqu’il a permis au Gabon de compter près de 71 000 emplois en 2014 et de ramener le nombre d’emplois privés formels quasiment à son niveau de 1985, son plus haut historique.
A l’analyse si le Gabon maintenait un taux de croissance moyen supérieur à 5% au cours des 8 prochaines, si les cours de pétrole réintégrait des niveaux supérieurs à 80 USD le baril (ce que le contexte international tend à démentir) et si les investissements publics restaient soutenus, le Gabon pourrait compter à partir de 2023 beaucoup plus d’emplois privés que publics pour la première fois de son histoire.
La répartition des emplois formels par secteur d’activité
En 2014 le Gabon comptait 179 826 emplois formels dont 109 050 emplois publics et 70 776 emplois privés. Après avoir progressé de 5 651 emplois en 2014 pour s’établir à 109 050, le nombre d’emplois publics a baissé en 2015 (- 4 778) et continuerait de baisser en 2016 (- 2 478) selon les prévisions inscrites dans la loi de finances. En 2016 le Gabon devrait compter 101 794 agents publics.
Dans le secteur privé, les 70 776 emplois formels enregistrés en 2014 étaient répartis dans 12 grands secteurs d’activité. Le secteur Transports/Télécom, premier d’entre eux, comptait 11 869 employés en 2014. Les services (hors Banques et Assurances) employaient 11 780 individus.
Longtemps second employeur du pays après l’administration publique, le secteur forestier n’arrive désormais plus qu’en 3e position avec 10 650 emplois en 2014. Il demeure cependant devant le secteur commerce (8 240 emplois), BTP (5 669 emplois), agriculture (5 285 emplois) ou pétrole (4 457 emplois).
Si le nombre d’emplois dans l’agriculture au Gabon reste relativement modeste, ce secteur est cependant celui qui connait la plus forte progression d’emplois créés (+77.83%) entre 2013 et 2014. On observe en effet que les emplois créés à l’occasion des programmes d’hévéaculture et de palmiers à huile conduits principalement par les entreprises Olam et Siat Gabon ont permis de faire passer le nombre d’emplois dans le secteur de 2 972 emplois en 2013 à 5 285 en 2014.
Les emplois dans les mines qui s’établissaient à 2 251, en hausse de 24.36% par rapport à l’année précédente. En somme entre 2013 et 2014, le nombre d’emplois privés formels a progressé de 4.44%, soit un solde de création net de 3 010 emplois.
Rappelons cependant que tous les secteurs d’activités n’ont pas connu un accroissement du nombre d’emplois. Le BTP a ainsi perdu 15.58% de ses emplois entre 2013 et 2014 (- 1 046 emplois), les autres industries – 3.13% (- 60 emplois) et les services – 2.43% (-293 emplois).
Mays Mouissi
* Il faut distinguer l’économie informelle de l’économie dite souterraine. Dans un cas il s’agit de l’économie non-régulée mais généralement acceptée par les états qui souvent manquent des structures nécessaires à l’encadrement des activités informelles. A contrario, l’économie souterraine tend à désigner des activités illégales, parfois criminelles et dans tous les cas qui se distinguent par une volonté de se soustraire aux lois et règlements en vigueur.
Sources principales :
– Rapport sur la croissance et l’emploi en République gabonaise – Créer les conditions d’une croissance inclusive. Banque mondiale ;
– Lois des finances 2016, 2015, 2014 et 2013 ;
– Rapport du FMI n°15/47 Consultations de 2014 au titre de l’article IV pour le Gabon ;
– Cahiers économiques du Gabon « Protéger les pauvres en dépit du ralentissement de la croissance », Décembre 2015, numéro 101797, Banque mondiale.