Les limites de l’inclusion financière en zone CEMAC
Au moment où se réunissent à Brazzaville (Congo) des personnalités du monde bancaire pour réfléchir à une stratégie afin d’améliorer l’accès aux services bancaires dans l’espace CEMAC, il convient d’en analyser les contours.
Les limites à la bancarisation des populations
Avec seulement 7% de sa population bancarisée, la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC) est l’une des régions d’Afrique où l’inclusion financière accuse un important retard. Au fil des ans, l’accès des populations aux services bancaires a été freinée par :
– Les coûts des services bancaires en inadéquation avec le niveau de revenu des populations ;
– La faible densité des réseaux bancaires particulièrement absents des milieux ruraux ;
– L’inadéquation de l’offre bancaire proposée notamment aux particuliers ;
– La prépondérance du secteur informel dans les échanges économiques ;
– Le fait culturel qui tend à favoriser des échanges sans intermédiaire entre les individus.
A ces limites il faut ajouter une organisation administrative chaotique des Etats qui rend quasiment impossible la constatation de la propriété immobilière par un acte officiel opposable en bonne et due forme. En conséquence, les propriétaires immobiliers ne peuvent se prévaloir de leur bien pour garantir un financement sollicité auprès d’un établissement bancaire.
Par ailleurs, les populations les moins favorisées se sentant de fait exclues du système bancaire en raison de leur condition sociale, privilégient les échanges ou les crédits de gré à gré avec des proches.
Des solutions pour améliorer la bancarisation des populations
A l’heure où le recours au système bancaire constitue un puissant levier de développement, il est urgent que les Etats de la CEMAC, les établissements bancaires et les autorités de régulation créent les conditions nécessaires à l’amélioration du taux de bancarisation des populations. Ainsi, les réseaux bancaires doivent-ils être densifier et couvrir les pays en milieu urbain comme en milieu rural.
Des fonds publics susceptibles de supporter la charge des frais bancaires des plus démunis doivent être mobilisés. Une telle action serait de nature à permettre l’accès aux banques à des personnes qui en sont exclues par leur condition sociale.
Par ailleurs, les Etats se doivent de désormais verser la solde de leurs agents sur des comptes bancaires ouverts en leur nom et mettre fin au paiement des salaires en liquide dans les perceptions du Trésor public. En contrepartie de la bancarisation générale des agents de l’Etat les établissements bancaires pourraient leur offrir des tarifs préférentiels.
Afin de s’aligner sur les normes internationales relatives à la surveillance des flux financiers, les Etats devraient plafonner le montant des opérations pouvant être réalisées en espèce. L’effet induit sera une augmentation des flux transitant par les banques et pouvant faire l’objet de contrôle. Les moyens des agences d’investigations financières doivent être renforcés, leurs équipes doivent être dotées d’outils adéquats pour organiser la lutte contre le blanchiment d’argent, la lutte contre le financement du terrorisme, la lutte contre la corruption, la lutte contre les abus de faiblesse, etc.
Enfin avec des offres bancaires souvent calquées sur le modèle européens, les banques devraient innover et construire des offres adaptées à la population locale (entreprises où particuliers).
En mettant en œuvre ces actions, la CEMAC pourra progressivement accroitre son taux de bancarisation.
Mays Mouissi