Quand les banques africaines deviennent leaders en Afrique
Longtemps dominé par les banques occidentales, le marché bancaire africain s’est profondément transformé au cours des dernières décennies. Alors que des banques européennes secouées par la crise des subprimes se sont progressivement retirées de certains pays, les banques africaines en ont profité pour étendre leur activité sur le continent. Désormais dans toutes les régions d’Afrique on trouve des établissements bancaires africains, souvent leaders sur leur marché, implantés dans plusieurs pays et qui cachent à peine leur ambition panafricaine.
Le réveil des banques africaines
La fin des années 90 a eu l’effet d’un naufrage pour le secteur bancaire africain. Sous les poids des ajustements structurels imposés par les institutions de Bretton Woods à la majorité des pays africains, de nombreuses banques nationales africaines ont été vendues à vil prix ou parfois simplement liquidées. Le paysage bancaire africain avait été clairsemé. Pourtant 20 après, les banques africaines sont de retour sur le continent et dans l’ensemble elles ne cessent d’engranger des succès. Nombre d’entre-elles ont détrôné des banques occidentales pourtant restées leaders des décennies durant et auxquelles il était reproché un manque d’innovation, l’absence d’un réseau d’agences suffisamment dense et une politique commerciale orientée uniquement vers les très grandes entreprises.
Profitant de la crise financière qui a obligée certains grands groupes bancaires occidentaux à réduire encore plus leurs investissements et parfois à céder leurs filiales africaines, les établissements bancaires africains ont au contraire étendu leurs activités en dehors des frontières de leurs pays d’origine. Une analyse globale permet de constater qu’ils ont pour la plupart construit une stratégie commerciale leur permettant de se différencier des banques occidentales.
Ainsi alors que les banques occidentales s’étaient toujours installées dans les centres-villes, les banques africaines ont été les premières à ouvrir des agences dans les quartiers populaires, à offrir une gamme de service adaptées aux PME, à proposer des solutions de transferts d’argent à des tarifs compétitifs et plus récemment à offrir des solutions de mobilbanking.
La principale victoire des banques africaines est celle de la confiance. En effet, les nombreuses faillites enregistrées pendant la période des ajustements structurels avaient installé un sentiment de méfiance vis-à-vis des banques. Aujourd’hui la situation semble s’être inversée, les épargnants n’hésitent plus à souscrire aux services des banques africaines qu’ils jugent souvent mieux adaptés à leurs besoins. Par ailleurs, l’installation des banques africaines dans plusieurs pays et même parfois dans plusieurs régions d’Afrique a permis de diversifier leurs risques et d’augmenter leur résilience.
Les banques africaines s’implantent sur le continent
En matière d’implantations à travers le continent, les exemples sont nombreux et les succès aussi. Ainsi le Groupe togolais Ecobank est-il devenu le groupe bancaire le mieux implanté en Afrique avec 33 succursales à travers le continent. Ecobank est présent dans toutes les régions du continent et dans tous les espaces linguistiques. Il dispose aujourd’hui d’un actionnariat diversifié dans lequel on trouve à la fois des togolais, des nigerians et des sud-africains. Le groupe est à la fois côté à la bourse de Lagos et à la bourse d’Abidjan.
Avec respectivement 19 et 17 succursales sur le continent, UBA et Standard Bank sont les principaux ambassadeurs financiers du Nigéria et de l’Afrique du Sud à travers l’Afrique. Ils sont suivis de près par le Maroc dont au moins 3 groupes bancaires sont panafricains (BMCE, Banque Atlantique et Attijariwafa Bank).
En Afrique Centrale, le marché est dominé par les banques nationales. La gabonaise BGFI Bank (9 succursales en Afrique) est leader bancaire de l’espace de la communauté économique des états d’Afrique centrale (CEMAC) tandis qu’Afriland First Bank est leader sur son marché domestique au Cameroun.
La croissance des groupes bancaires africains est tirée par la croissance du continent qui enregistre année après année une progression moyenne de 4 à 5%. La naissance d’une classe moyenne a également facilité l’accès à l’offre des services bancaires dans les centres urbains. Cependant, en dépit des performances des banques africaines, l’Afrique reste confronté à un très faible taux de bancarisation. Les milieux ruraux sont des déserts financiers. La bataille de l’inclusion financière reste donc le principal défi à relever par les banques africaines.
Mays Mouissi
2 réponses
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